Étant sémioticienne des arts visuels et horticultrice-arboricultrice, il n’est pas étonnant que ce qui me fascine le plus du monde naturel est cette présence de motifs récurrents. Ceux-ci ne sont pas le fruit du hasard, leur « formation est influencée par la morphogénèse, un ensemble de lois qui vont déterminer, comme leur nom l’indique, à quoi vont ressembler les organismes quand ils sont encore au stade embryonnaire« .

On dit que l’être humain cherche depuis toujours à créer du sens et à mettre de l’ordre dans le monde naturel en repérant des motifs dans la nature. Mais il n’y a pas un seul un calcul mathématique qui peut venir à bout de notre émerveillement pour la spirale que l’on retrouve autant dans les ouragans, les tornades, les fougères, les choux, les roses, les cocottes et la galaxie. Rien ne peut enrayer cette fascination pour les fameuses fractales que forment les flocons de neige, les arbres et les côtes que dessinent nos continents.
Les vidéos-expériences du scientifique Stephen Morris de boue qui sèche et de glaçons en formation sont tout simplement hypnotisantes.
La science nous raconte que les impuretés sont à l’origine des irrégularités de bien des formes: de la singularité des glaçons, par exemple. Si l’eau qui forme la glace était complètement pure, c’est-à-dire distillée, les glaçons seraient tous lisses et identiques.
Et que dire des couchers du soleil qu’on aime tant? Dans Nature Anatomy, The Curious Parts And Pieces of the Natural World, Julia Rothman explique que les rouges, les orangers et les roses qui nous subjuguent tout juste avant le crépuscule proviennent, eux aussi, des impuretés dans l’air, alors que les rayons les traversent à l’horizontale. Parmi ces impuretés, il y a l’eau dans l’air (ce qui explique les couchers de soleil extraordinaires du bas du fleuve), mais aussi la pollution, le pollen et la poussière.
Dans son célèbre livre Formes et motifs dans la nature, Philippe Ball fait quant à lui d’étonnantes comparaisons entre les motifs dans le sable du désert et ceux d’une coquille de mollusque. Il crée un parallèle entre les hexagones que forment des bulles entassées et ceux, faits de cire, que l’on retrouve dans les ruches d’abeille. On y constate aussi que l’intérieur du corps humains: les poumons, les veines, les organes, est tout en résonance avec le milieu dans lequel il évolue.

On peut se demander si le fait de voir trop de formes qui ne ressemblent pas avec celles que l’on portent en soi ne serait pas à l’origine d’un sentiment de déconnexion. Des études en psychologie ont démontré que d’être exposé à des fractales, par exemple, réduirait le stress. Certains affirment aussi que les toiles de Jackson Pollock aurait un effet similaire, puisqu’elles font visuellement écho à des motifs dans la nature sans les représenter.
Moins à la recherche d’un ordre dans le monde, que de connexions entre les éléments, j’observe attentivement les motifs dans la nature urbaine parce que ceux-ci m’éveillent à mon environnement, aux autres et à moi-même. Par une sorte de résonance, ils me font sentir vivante…
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